L’univers de l’émigration clandestine regorge d’histoires aussi diverses que surprenantes, et celle d’A. Sow, un conducteur de camion sénégalais, ne fait pas exception. Son récit déconcertant révèle les extrémités auxquelles certains sont prêts à aller pour financer leur voyage vers des contrées plus clémentes, en l’occurrence, l’Italie.
Tout commence par un appel en apparence banal au début du mois d’octobre. A. Sow, qui jouit de la confiance de son patron, Modou Mboup, informe ce dernier de son départ imminent pour le Mali, où il devrait convoyer une cargaison de produits halieutiques. Un trajet qu’il avait déjà effectué à maintes reprises au cours des deux dernières années, ce qui explique probablement le peu de suspicion de son employeur.
L’appel anodin prend rapidement une tournure inattendue. Après les salutations d’usage, A. Sow, au lieu de se préparer pour le voyage vers le Mali, informe son patron de sa vente du camion à un Malien et de l’utilisation de l’argent ainsi obtenu pour financer son propre périple vers l’Espagne. Une révélation qui laisse Modou Mboup sans voix et sans nouvelles de son employé.
La méthode utilisée par A. Sow pour réaliser cette escroquerie est aussi simple qu’audacieuse. Ayant convaincu son patron de son départ au Mali, il réussit à recevoir l’avance financière destinée au voyage. Cependant, une fois l’argent en poche, il rompt tout contact avec Modou Mboup, laissant ce dernier dans l’expectative pendant une semaine avant de lui annoncer la vente du camion et son escapade vers l’Espagne.
Le transporteur, choqué par cette trahison, ne peut rien faire pour stopper A. Sow, qui se trouve déjà à l’aéroport du Maroc au moment de l’annonce. Face à cette impuissance, Modou Mboup n’a d’autre choix que de porter plainte à la Division des investigations criminelles (Dic) pour obtenir justice.
Cette histoire, bien que singulière, n’est pas un cas isolé parmi les chauffeurs de camion sénégalais impliqués dans des actes d’abus de confiance. Un autre récit similaire met en lumière un collègue d’A. Sow qui, convoyant 50 tonnes de ciment destinées au Mali, vend toute la marchandise à Bamako. Au lieu de se rendre au Mali, il se dirige vers la Côte-d’Ivoire, laissant le commerçant malien dans l’attente de sa cargaison disparue.
Ces incidents répétés ont alerté la Fédération nationale des transporteurs qui envisage sérieusement une mission d’information auprès des autorités maliennes. L’objectif est de sensibiliser sur cette nouvelle stratégie adoptée par certains chauffeurs sénégalais désireux de rejoindre l’Occident ou les États-Unis à tout prix.
L’histoire d’A. Sow, conducteur de camion, souligne l’étendue des défis et des surprises auxquels sont confrontés ceux qui, animés par le désir d’une vie meilleure, tentent l’émigration clandestine. Ces récits révèlent la créativité parfois déconcertante des candidats à l’émigration, prêts à tout pour réaliser leur rêve, même au détriment de la confiance de ceux qui les entourent.