Joe Biden a annoncé mardi qu’il fermerait temporairement la frontière des Etats-Unis avec le Mexique à chaque rebond d’arrivées de migrants clandestins, un coup de barre à droite pour tenter de séduire une partie de l’électorat en pleine campagne pour se maintenir à la Maison Blanche face à Donald Trump.
Le président démocrate, 81 ans, va signer un décret annoncé de longue date qui empêcherait les migrants entrés illégalement d’accéder au système d’asile lorsque leur nombre dépasse les 2.500 par jour. Le texte facilitera aussi les expulsions vers le Mexique, selon la Maison Blanche.
« Pour Joe Biden, la sécurité des familles américaines doit toujours passer en premier. C’est pourquoi le président annonce aujourd’hui de nouvelles mesures historiques visant à empêcher les migrants qui franchissent illégalement notre frontière méridionale de bénéficier de l’asile » aux Etats-Unis, a déclaré un porte-parole de la Maison-Blanche, Andrew Bates.
Le chef de l’Etat doit lui-même s’exprimer à 14H00 (18H00 GMT), a dit la Maison Blanche.
Des responsables américains ont précisé que les nouvelles restrictions devraient entrer en vigueur avec effet immédiat, car le nombre de personnes franchissant la frontière sans papiers en règle est déjà supérieur au seuil fixé.
« Nous nous attendons à ce que la mesure entre en vigueur immédiatement », une fois le décret signé, a dit un responsable américain sous couvert de l’anonymat.
Les demandeurs d’asile seraient à nouveau autorisés à entrer dès que leur nombre tomberait à 1.500 par jour, selon les mêmes sources.
Cette politique d’immigration, l’une des plus restrictives jamais adoptées par un président démocrate, le rapprocherait des positions de son prédécesseur républicain Donald Trump alors que tous les sondages montrent que le sujet pèse lourd sur les chances de réélection de Joe Biden en novembre.
L’équipe de campagne de Donald Trump a balayé la mesure comme une tentative désespérée pour séduire l’électorat le plus conservateur.
« Joe l’escroc fait juste semblant de sécuriser la frontière parce qu’il coule dans les sondages », a-t-elle lancé, accusant une nouvelle fois les migrants clandestins d’être à l’origine d’une vague de criminalité aux Etats-Unis.
Or, ni les statistiques policières disponibles dans les grandes villes américaines, ni les études réalisées par des experts, ne montrent la réalité d’un tel phénomène.
« Nous sommes sans cesse en train d’examiner toutes les options possibles pour tenter de résoudre les problèmes liés au système d’immigration, qui ne fonctionne pas depuis des décennies », a commenté lundi la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre.
– Stratégie risquée –
Un texte prévoyant des financements pour durcir la politique d’immigration, négocié durant des mois au Congrès par les deux partis dans le cadre de projets d’aides pour l’Ukraine et Israël, avait été rejeté en début d’année par l’opposition républicaine, a-t-elle rappelé.
« Ils ont décidé de faire de la politique partisane », a-t-elle fustigé.
La Maison Blanche s’est efforcée mardi de désamorcer les critiques selon lesquelles M. Biden copierait effectivement M. Trump, en utilisant les mêmes dispositifs que son prédécesseur.
« Toutes ces politiques contrastent fortement avec la manière dont l’administration précédente a géré l’immigration », a avancé un deuxième haut responsable.
« Ils ont diabolisé les immigrés, institué des raids massifs, séparé les familles à la frontière et mis les enfants dans des cages », a-t-il dit.
Malgré tout, avec ce durcissement, Joe Biden adopte une stratégie risquée.
Ces mesures pourraient en effet susciter la colère de l’aile gauche de son parti, ce décret se basant sur une loi préalablement utilisée par l’administration Trump pour interdire l’entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de plusieurs pays musulmans.
En tout état de cause, elles devraient être contestées devant les tribunaux.
A l’approche de la présidentielle de novembre, les républicains cherchent à faire de l’immigration le sujet central du débat, accusant Joe Biden d’être responsable d’une « invasion ».
Donald Trump, qui avait construit lors de son mandat des pans de mur à la frontière mexicaine, tient une rhétorique de plus en plus incendiaire envers les migrants, les accusant d' »empoisonner le sang » du pays.
Dans les 12 mois qui ont précédé octobre 2023, 2,4 millions de personnes ont été interceptées à la frontière avec le Mexique, un record.
En décembre, quelque 10.000 personnes, poussées par la pauvreté et la violence en Amérique latine, traversaient illégalement la frontière chaque jour. Ce nombre a depuis baissé, mais le sujet reste brûlant.