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[Focus] Réparation de l’hymen, Recul du laabane : la virginité, un concept périmé ?

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Jadis la préservation de la virginité était une affaire familiale dans nos sociétés. Une question d’honneur. Aujourd’hui, beaucoup de filles ne se cassent plus  la tête pour la préserver. Les hommes n’en font plus le critère phare dans le choix de leur épouse. Comme par enchantement, la virginité perd de la valeur dans l’indifférence de la nouvelle génération. D’autant plus que la médecine offre la possibilité de se refaire une nouvelle virginité. Les gardiens du temple sont dans tous leurs états.

La préservation de la virginité n’est pas une question personnelle dans beaucoup de sociétés africaines. C’est une question familiale. Les responsables surveillent leurs filles comme du lait sur le feu. C’est une question d’honneur pour la lignée. Les filles sont donc sous pression jusqu’à l’âge de leur mariage. Dans nos sociétés, elle est signe de chasteté, de sagesse et de pureté de la jeune fille.

Aujourd’hui est-ce qu’il y a des filles qui sont prêtes à faire ce sacrifice au nom de l’honneur de la famille ? La modernité et les influences extérieures n’ont-elles pas remis en cause ce code sociétal ?

Actuellement, la jeune génération qui n’accorde guère de l’importance à ce trésor sacré qu’il fallait préserver à tout prix avant le mariage. Pour bon nombre de personnes, cela demeure un mythe, une culture car ce n’est ni écrit dans le coran.

L’abstinence jusqu’au mariage n’est plus une obsession. La virginité était fêtée, le lendemain de la première nuit de noces au rythme des Tam-Tams et des cantiques des troubadours. Les signes de chasteté étaient montrés à quelques femmes.  L’abstinence jusqu’au mariage n’est plus un critère déterminant dans le choix d’une conjointe par des hommes.  Cheikh Ndiaye, plus connu sous le sobriquet de Kheuch Ndiaye, célibataire d’une vingtaine d’années, a effacé la virginité sur la tablette de ses critères. La vertu d’une femme ne peut pas être résumée à la virginité.  « Dès l’instant, que j’ai des sentiments pour toi, toi aussi pareil, tu m’aimes tu me respectes, cela me convient », décrit ce célibataire. De nos jours, c’est une illusion de vouloir s’accrocher à cela or, la médecine offre les possibilités de refaire une virginité. « Avec l’évolution de la médecine, les femmes peuvent fabriquer la virginité en allant voir un médecin. Donc, je ne vais pas me focaliser sur cela pour fonder ma vie. Il y a des femmes qui se disent vierges et qui ne le sont pas en fait », a argumenté Kheuch Ndiaye.

Il égrène d’autres considérations. L’amour réciproque et le respect mutuel doivent primer sur la virginité. « Il  vaut mieux avoir une femme qui n’est pas vierge, qui répond à tes besoins, qui te satisfait comme tu le veux au lieu d’avoir une  vierge qui ne respecte pas », préfère notre interlocuteur. Cette position fait écho aux propos de la militante féministe, Dialy Badiane. Elle utilise des mots durs contre les tenants de ce critère. « C’est de la pure hypocrisie d’imposer aux femmes de garder leur virginité afin de faire plaisir à l’homme qui l’épousera », a-t-elle tranché. Au passage, elle rappelle que, au plan religieux, l’exigence de  chasteté s’applique à la fois aux garçons et aux filles jusqu’au mariage. De son avis, la virginité qui renvoie culturellement au signe de chasteté et de pureté est très contestable et même fausse. « Ce n’est pas parce qu’une fille est vierge qu’elle est de bonne moralité ou autre », objecte Dialy Badiane.  Mieux, elle invoque que des filles naissent sans virginité. D’autres la perdent suite à un accident, une chute ou même le stress.

La virginité sous l’angle sociologique

Du reste l’effritement de la valeur de la virginité est une évidence. Au point que le sociologue, Mamadou Moustapha Wone apporte des éclaircissements entre ce qui relève de la valeur et de la norme. Pour le spécialiste des faits sociaux, les normes sont des valeurs auxquelles on apporte beaucoup d’importance et accompagnées de pression sociale.  Toutefois, les valeurs ne peuvent pas être des normes dans une société. D’après lui, si l’on se réfère aux sociétés traditionnelles, la virginité  était une norme et une valeur alors que dans les sociétés contemporaines, elle ne peut être considérée comme une norme car il n’y a pas de pression sociale. De plus aucune sanction n’est prévue s’il se révèle que la fille n’est pas vierge lors de la cérémonie nuptiale .Même s’il y a une sanction, elle n’est pas sévère c’est-à-dire la fille n’est pas réprimandée. Actuellement, elle n’est ni exilée ni frappée comme auparavant. De plus, la famille ne croule pas sous le poids de la honte.

Peut-être que ce sera un secret gardé juste entre cette fille ou cette femme et son conjoint ou à la limite dans sa famille parce qu’on veut toujours recouvrir à la  présentation de  la chose en tant que telle. Donc, actuellement, on peut dire que la virginité est encore une valeur même si elle n’est plus une norme. La pratique de l’hyménoplastie est là pour le confirmer. On a quitté un paradigme communautaire ou tout le monde avait droit de regard vers un paradigme individualiste selon le spécialiste. Ainsi, si on est dans ce contexte, il est sûr que vierge ou non, c’est un fait qui ne concerne plus pratiquement les autres. Cela ne concerne que les deux conjoints contrairement à avant. Le contrôle social dans ce cas de figure est moins ressenti et les sociétés devenant de plus en plus permissives, laissent apparaître une diversité de comportements et d’attitudes devant n’importe quel fait social, sexuel ou non.

Si d’aucuns n’accordent pas de l’importance à la virginité, d’autres par contre y croient jusqu’à présent. C’est le cas de cette femme divorcée Khady Ndiaye. Pour cette coiffeuse, la virginité occupe toujours une place primordiale dans la société, surtout celle sénégalaise. Car malgré la mondialisation, il y a toujours des gens qui sont attachés aux coutumes. Il y a un dicton qui dit « fou don ndokh ta say yo démé fek fa téppe tép ». « Si je parle ainsi je ne me réfère à la jeune génération car une bonne partie de cette masse population connaît déjà ou entretient des rapports sexuels, ils aiment trop le sexe », estime la dame. Pour cette dernière, beaucoup s’en fichent de la virginité. Toutefois, certaines filles se font une nouvelle virginité par la magie de la médecine juste pour honorer leur famille.  Pour cette jeune femme, les filles doivent savoir que le ‘’laabane’’ maintient toujours sa place tient bien même si c’est interdit par l’islam. Pour sa part, la virginité fait partie d’un respect envers son mari.

Le laabane, une pratique actuelle ou révolue ?

A cette question, les réponses sont diverses. Des personnes comme Dialy Badiane et d’autres qui trouvent cela indécent. A l’inverse, certains veulent que cette tradition soit maintenue. S’il y a un sujet sur lequel la griotte Mbodja Mbaye ne plaisante pas, c’est la virginité. La griotte chante le retour du laabane au nom de la préservation de notre culture. A ses yeux, le laabanne est célébré aux rythmes des roulements de tambours après la nuit de noces, n’est plus à la mode. Même si elle admet que le laabane est banni par l’islam. Elle soutient que cette tradition relève de la culture. « Auparavant, de telles festivités célébrées à l’honneur de la fille et de sa famille étaient un clin d’œil aux autres filles. Ces dernières étaient de fait invitées à préserver leur virginité. A la fin de la nuit nuptiale le lendemain, on appelle des tambours et les amis de la jeune fille pour partager ensemble le petit-déjeuner », confie-t-elle. La dame se désole que de nos jours que cette pratique n’est plus de vigueur parce que les filles mènent déjà leur vie sexuelle avant leur mariage.  « Beaucoup d’hommes se marient sans savoir que leur femme n’est pas vierge et qu’elle a fait recours à la médecine pour retrouver sa virginité ».

Hôtels et auberges pour les nuits nuptiales  

Les hôtels et les auberges sont des lieux de célébration de la nuit nuptiale. C’est une parade pour dissimuler la perte de la virginité avant le mariage et par conséquent de se soustraire aux critiques de la société. Quoi qu’il en soit, cette séquence des festivités était bien célébrée au sein de nos sociétés. « C’était une très belle fête. Nous assistions avec fierté et joie. On se mettait au milieu du lit à pleurer avec la mariée et la tante chantait. Contrairement à ce que nous avons  souvent l’habitude d’entendre, le pagne n’était pas brandi. Ce sont de fausses informations. Car seule ta mère et ta tante de la mariée étaient autorisées à le voir. Après cette phase, il s’agissait pour la mère de récupérer le pagne, de faire le rinçage et diko djitlo », détaille-t-elle.

Recours à l’hyménoplastie, une solution

Aujourd’hui, beaucoup de filles ne s’embarrassent guère de cette pratique. Toutefois, il y a d’autres qui s’investissent pour retrouver la virginité perdue. Elles font recours à l’hyménoplastie alors que le mariage se fait sur la base de la confiance, du matérialisme et du luxe. « Pour moi, les jeunes filles doivent apprendre à dire la vérité. Le  fondement du mariage, c’est d’abord la confiance entre les deux conjoints. Les deux partenaires doivent se faire confiance mutuellement. Il ne doit pas y avoir un mensonge car seule la vérité triomphera un jour. Du coup, je trouve insensé que des jeunes filles fassent recours à l’hyménoplastie juste pour leurrer leur mari », conseille Khady.

Elle soutient également que des filles font la réparation de leur hymen avec la pression de leurs parents. Elle ne voit pas d’ailleurs pourquoi les hommes doivent s’accrocher à la virginité si l’on sait qu’ils n’ont pas cultiver l’abstinence avant le mariage.  Notre interlocutrice dévoile l’histoire d’une de ses amies qui  était mariée avant de divorcer. Malgré tout, elle a gardé son éclat qui a fait chavirer un émigré. Elle n’a pas tenu un langage de vérité à l’émigré qui n’a pas su qu’elle était divorcée. Il était loin de s’imaginer qu’elle n’était pas vierge. « Elle a menti au gars en lui disant qu’elle n’était jamais mariée encore moins qu’elle est mère jusqu’à ce que ce dernier décide de venir pour le mariage. Alors, elle est allée faire l’hyménoplastie sans que l’époux ne soit au courant de quelque chose jusqu’à à peu près 6 mois de mariage. Malheureusement pour elle, son plan n’a pas marché car des rumeurs fusaient de partout et les problèmes ont commencé. Elle a menti et le divorce s’en est suivi et cela s’est passé ici au Sénégal », narre notre interlocutrice.

Le laabane n’est pas régi en Islam

Les relations sexuelles hors mariage sont interdites aussi bien pour l’homme que pour la femme selon les enseignements des religions révélées. Toutefois, s’agissant de Laabane, il n’a pas été mentionné dans les textes en Islam selon Sayda Diamilatou Diakhaté. Le mariage est l’union de deux personnes qui décident de fonder une famille. C’est juste que leur intimité pour moi ne doit pas être dévoilée car il s’agit d’une relation entre deux conjoints pense Sayda Diamilatou Diakhaté. En résumé, ce n’est pas une chose interdite par l’islam. C’est une tradition héritée de nos ancêtres. « Si on convoque les recommandations de l’Islam à ce sujet, Dieu demande à tout couple d’entretenir des relations sexuelles en toute discrétions » a-t-elle fait savoir. Elle rappelle que la fornication est interdite.

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